L'état civil consulaire marocain

suivi de la liberté de choix du prénom.

Je remercie très sincèrement son excellence Monsieur l’Ambassadeur du Royaume du Maroc au Japon et Monsieur Mohamed CHOURAK, Conseiller politique en charge des affaires consulaires de l’Ambassade pour m’avoir ouvert les portes de l’Ambassade afin de me permettre :

-          de poursuivre mon étude relative à l’état civil marocain,

-          de débuter mon étude de l’état civil japonais.

Je remercie également tout le personnel de l'Ambassade pour sa disponibilité.

Le Maroc compte aujourd’hui environ 5 millions de MRE, pour les non-initiés Marocains Résidents à l’Etranger. Le Royaume a pris conscience il y a quelques années ,de l’importance humaine et financière de cette population

 

La problématique de l’état civil, c’est-à-dire de l’identité et de la nationalité, est donc essentielle.

 

Rendez-vous est pris à l’Ambassade du Maroc au Japon pour explorer le sujet.

 

Naissance et décès 

 

Il n’y a pas de difficulté en cas de naissance ou de décès. Il suffit de venir à l’Ambassade (ou au consulat selon les pays) pour faire transcrire sur les registres de l’état civil consulaire les déclarations de naissances ou de décès, survenus dans le pays de résidence. Les citoyens disposent d’une année civile pour enregistrer. Les registres papiers sont exactement les mêmes que ceux qui existent sur le territoire marocain : livre noir, épais, que l’on remplit à la main. Un exemplaire des registres est envoyé à la fin de chaque année civile au Maroc, un second est conservé dans les archives de l'Ambassade.

Le mariage musulman

 

Les règles relatives au mariage sont quelques peu différentes. Elles ont été simplifiées grâce à la réforme du code de la famille « moudawana » en 2004, facilitant alors les formalités aux MRE. Ainsi que je vous l’avais expliqué (cf l’article sur le Maroc), le mariage relève du statut personnel des citoyens : les musulmans se marient pardevant un adoul (sorte de notaire coutumier, de confession musulmane).

 

Or, les consuls ne disposent plus de la compétence « adoulaire » pour marier des musulmans, alors comment faire à l’étranger ?

 

Le nouveau Code de la Famille a expressément encadré cette situation : « Les marocains résidents à l’étranger peuvent contracter mariage, selon les formalités administratives locales du pays de résidence (…) » (Article 14 ). La suite de l’article pose un ensemble de conditions propres au droit marocain concernant notamment, la capacité, les empêchements au mariage, la dot (sadaq) et la présence impérative de deux témoins musulmans.

 

Monsieur Mohamed CHOURAK m’a bien précisé qu’il établissait un additif concernant la dot, puisque cette mention ne figure pas sur l’attestation de mariage japonaise. En effet, la dot est une des conditions de validité de l’union ; l’article 13 du code de la famille dispose clairement qu’il n’est pas possible d’y renoncer.

 

Ensuite, l’acte de mariage étranger traduit doit être transcrit, non pas dans les registres consulaires, mais directement au Maroc, au lieu de naissance de chacun des conjoints. Et si les conjoints ou l’un d’eux ne sont pas nés au Maroc, la copie est notamment adressée à la section de la justice de la famille de Rabat.

 

 

ZOOM Le SADAK ou la dot, qu’est-ce que c’est exactement ?

 

Le Code de la famille donne une définition précise du Sadak qui mérite d’être rappelée.

 

Article 26 du Code de la famille.

 « Le Sadaq (la dot) consiste en tout bien donné par l’époux à son épouse, impliquant de sa part la ferme volonté de créer un foyer et de vivre dans les liens d’une affection mutuelle. Le fondement légal du Sadaq consiste en sa valeur morale et symbolique et non en sa valeur matérielle. »

 

Article 28 du Code de la famille.

 « Tout ce qui peut faire légalement l’objet d’une obligation peut servir de Sadaq. Il est légalement préconisé de modérer le montant du Sadaq. »

 

 

 

Et le prénom marocain : le choix est-il libre ?

 

Les services consulaires vérifient les conditions de la transcription et notamment la conformité du prénom. La loi dispose que « Le prénom choisi (…) doit présenter un caractère marocain » (article 21, loi 37-99 du 3 octobre 2002, relative à l’Etat civil).

 

Mais qu’est-ce qu’un prénom à caractère marocain ?

 

Avant la réforme de l’état civil de 2002, avait été établie en 1996 une liste plutôt restrictive, des prénoms autorisés appelée « liste Driss Basri », du nom du Ministre de l’Intérieur.  L’objectif était double. D’une part, lutter contre l'occidentalisation des prénoms marocains ; d’autre part, freiner le développement de l'identité amazigh (berbère), puisque les prénoms amazigh en étaient presque systématiquement écartés. Abrogée par la suite, elle ne cessa et ne cesse pourtant pas d’être appliquée par certains officiers d’état civil, malgré des condamnations judiciaires et des rappels à l’ordre de l’Etat. En effet, le Ministère de l’intérieur a émis une circulaire en 2010, soulignant à nouveau que les prénoms marocains comprenaient les prénoms amazighs et hébreux pour les Juifs marocains. (Circulaire n° D-3220 du 9 avril 2010). En 2011, l’affirmation dans le préambule de la Constitution de la composante amazigh et saharo-hassanie du Royaume, ainsi que la reconnaissance de l’amazigh comme langue officielle du Royaume, au même titre que l’arabe (article 5 de la Constitution), n’auront pas suffi.

 

Des parents continuent aujourd’hui encore à rencontrer des difficultés, voire des refus d’enregistrement des naissances, particulièrement auprès d’ambassades et de consulats marocains à l’étranger. Un rapport des Nations Unies de 2012 révélait à la communauté internationale qu’ « Il semblerait que la liste de prénoms arabes approuvés est toujours en circulation et continue d’être appliquée par les officiers de l’état civil. En outre, une autre liste, celle-là de prénoms interdits, est également utilisée pour refuser aux parents la liberté d’enregistrer leurs enfants à l’état civil sous le prénom qu’ils souhaitent. ». Le rapport souligne que cette situation porte atteinte aux droits des citoyens et aux droits des enfants, tels que proclamés dans les conventions onusiennes ratifiées par le Maroc.    (Rapport de l’experte indépendante dans le domaine des droits culturels, Mme Farida Shaheed, Assemblée générale des Nations-Unies, Conseil des droits de l’homme Vingtième session Point 3 de l’ordre du jour . Promotion et protection de tous les droits de l’homme, civils, politiques, économiques, sociaux et culturels, y compris le droit au développement, 2012)

 

Le 17 mars dernier, la Haute Commission de l’état civil, a dû rappeler et souligner « la liberté du citoyen à choisir le prénom de son enfant (...) sans distinction aucune entre les prénoms arabe, amazigh, hassani et hébraïque » aux termes d’un communiqué. La presse s’en est fait largement l’écho, aurait-il résonné dans les services de l’état civil : affaire à suivre.